Dans cet article, je retrace la genèse de ma décision de démissionner et les actes qui s’en sont suivis jusqu’à aujourd’hui. C’est une histoire parmi d’autres, mon histoire …
Peut-être quelque part caché dans vos rêves les plus fous, vous auriez envie de démarrer une nouvelle vie … alors que rien ne vous y oblige, vous avez un poste confortable, dans une entreprise qui vous apporte une sécurité … et par les temps qui courent, c’est précieux … vous avez de la reconnaissance, des collègues sympas et une diversité d’actions qui remplissent vos journées; bref vous avez tout pour être bien…
C’était mon cas, mais au fond de moi ce petit truc que je serais tentée d’appeler « mon âme sauvage », en référence à l’excellent livre de Clarissa Pinkola Estès « Femmes qui courent avec les loups », n’a cessé, ces 4 dernières années, de grandir jusqu’à prendre une place tellement importante que progressivement j’arrivais à un état psychique proche du burn out, où plutôt du bore out avec ce sentiment permanent de « gâcher » une partie de moi, de ne pas me faire « honneur ».
Après avoir exploré diverses pistes et un accompagnement « psychocoaching », j’ai pu envisager un projet de reconversion; j’avais alors déjà franchi l’étape de me dire que je pouvais faire « un break » dans mon travail, mais sans conséquence pour mon emploi puisque mon entreprise offre la possibilité de revenir au bout de deux ans sans solde … Mais alors que je m’apprêtais à poser mon congé, une alternative s’est présentée à moi; j’y ai vu comme un signe … cet « appel de la forêt » était plus puissant qu’un simple break…
L’alternative :
Première étincelle apportée par une stagiaire rencontrée lors de la formation Artec module « Peinture Formes Couleurs » en mars 2021. Elle me parle de sa prochaine démission dans le cadre des dispositifs de reconversion professionnelle mis en place en 2019 via Transitions Pro.
Parmi ces dispositifs, deux permettent à un salarié de toucher une allocation chômage après démission. Pour cela, une commission paritaire (CPIR) doit attester du caractère réel et sérieux du projet de formation ou de création/reprise d’entreprise.
Ça mouline pendant quelques jours , je vais sur le site Transitions Pro que j’avais déjà consulté plusieurs fois pour mon projet de reconversion, mais sans faire attention aux dispositifs démissionnaires, pas pour moi … trop risqué, pas le moment, pas un sujet… en plus il fallait avoir un projet réfléchi et construit pour pouvoir l’exposer dans un dossier assez lourd.
Je lis et je relis et ça continue à mouliner… l’équation financière est implacable : soit je fais un emprunt de 35000€ minimum pour financer mes 12 mois de congés sabbatiques, soit je peux bénéficier d’une allocation de Pôle Emploi pendant 2 ans et demie à hauteur de la moitié de mon brut ou quasi. Mais une des trois conditions requises pour ça est implacable elle aussi : avoir 5 années de salariat consécutif sans aucune interruption … ce qui est mon cas mais ce qui ne le serait plus si je m’absente pour un congé sabbatique ne serait-ce que de 1 mois…
Du coup rétro planning : au vu du délai d’instruction de la CPIR qui est de deux mois maximum, une démission en octobre impose un dépôt de dossier pour fin mai dernier délai ! Et encore si je ne fais pas mes trois mois de préavis en entier…
Allez j’imprime le formulaire et je commence à renseigner les rubriques de ce qu’on peut appeler un business plan … mot absent de mon vocabulaire jusqu’à présent.
Nous sommes mi avril, j’ai un entretien avec une conseillère en évolution professionnelle (CEP) que j’ai contactée car c’est la première étape du processus. Elle me confirme que je ne peux pas prendre de congés si je veux pouvoir bénéficier de ce dispositif et que l’option démission formation n’est plus possible pour moi car je suis déjà engagée dans une formation. Il ne me reste plus que l’option démission création d’entreprise …😬
On prend rendez-vous pour le 27 mai, date à laquelle je serais sensée avoir finalisé mon dossier pour lequel elle m’a donné des conseils; avec le recul je peux dire que toutes les personnes CEP à qui j’ai eu à faire ont toutes été d’un bon soutien, dans une interaction positive.
Ca re mouline… non plus le temps en fait : démission + création d’entreprise deux mots, deux situations auxquelles je n’étais pas préparée, qui vont prendre toute la place dans ma tête pendant 6 semaines. 6 semaines où je me projette sans le CEA, où je vis toutes les phases du deuil en accéléré – je fais des exercices de journal créatif pour m’aider – et où je me projette en accéléré aussi dans une future auto-entreprise avec un plan de financement sur 3 ans.
21 mai : j’envoie le dossier quasiment finalisé sous format word (ce détail à son importance) à la CEP en espérant qu’elle le regardera avant notre rdv prévu le 27 mai. Plus que 10 jours avant le 31… le 25 elle m’appelle en me disant que le dossier est complet selon elle, quel soulagement 😅 il ne « reste plus qu’à » rentrer tout ça dans la plateforme Transitions Pro en suivant la procédure détaillée qui, malgré tout, reste interprétable … on sent un flou côté CEP… c’est récent comme procédure, pas encore ancrée …
Déjà je dois faire des copiés collés de mes différents paragraphes joliment présentés dans word, dans un infâme formulaire pdf « modifiable »; le temps de trouver le bon outil … je charge l’application Acrobat Reader sur ma tablette pour l’occasion avec une semaine gratuite (je me mets un rappel pour ne pas oublier de me désabonner quand j’en aurai terminé) ; bref après une bonne matinée de prise de tête pour que ça rentre dans les espaces dédiés non modifiables, je finis par accoucher d’un formulaire complet avec des tailles de caractère plus ou moins petites et des chevauchements entre les paragraphes … 🧘… je commence sérieusement à avoir envie de hurler … mes neurones m’implorent pitié mais je dois négocier avec eux pour finaliser dans la plateforme, maintenant …
Je ne sais pas trop comment je vais me débrouiller mais j’y vais , je crée mon compte et un dossier démission … je m’aperçois qu’il faut joindre un document à part appelé étude de marché … je remets tout à plat pour fabriquer le document qui correspond; je dépouille le dossier complet des éléments que je fais rentrer dans ce nouveau document … bref grosse perte de temps, si j’avais su avant … mais bon j’ai pris deux jours de congés pour finaliser, je finaliserai …
27 mai : mon RV de 14H est compromis, ma CEP est appelée en urgence à l’école de sa fille… heureusement sa responsable m’écoute dire à quel point mon dossier est urgent et me propose une autre personne pour l’après midi qui pourrait prendre le relai … là je me dis : est-ce un signe … ? Le doute s’installe…🤔
Finalement la chef CEP me dit que je peux laisser tomber la plateforme car c’est pas encore au point, trop compliqué … et que je dois imprimer le dossier et les pièces jointes pour les mettre au courrier… 🧘🧘 … et que ma CEP me renverra le lendemain matin le dossier signé et sa synthèse écrite qui relate nos échanges, pièce indispensable pour la commission.
Je commence à tout imprimer et là entre le manque de toner et les impressions du tableau qui ressortent avec des chiffres illisibles, je frise le craquage complet … 🧘🧘🧘
28 Mai : je reçois comme prévu les documents signés par la CEP et enfin je (mon mari en réalité) poste l’enveloppe en recommandé avec AR… 😥😅
A partir de là je n’ai plus qu’à espérer que mon dossier passera à la commission de juin et aura un avis favorable. En parallèle je me renseigne auprès de Pôle emploi pour être bien sûre à 100% (ce petit 0,1% d’incertitude me prend facile 10% de ma bande passante ) que je remplis toutes les conditions (le gras a son importance) et auprès de mon travail pour voir si le préavis peut être négocié.
Au travail il m’est de plus en plus difficile de rester motivée et présente à ce que je fais; j’ai la tête ailleurs, ma formation me porte et je découvre un monde nouveau fait de contacts avec matières, couleurs, textures, formes, écritures… dans lequel l’imaginaire a toute sa place. Les sources d’inspiration pour nourrir cet imaginaire sont infinies et j’apprends à regarder la nature et le monde qui m’entourent autrement … à 54 ans il est temps de me reconnecter à ma nature de femme sauvage, pour reprendre un concept déployé par Clarissa Pinkola Estès (j’en ai déjà parlé plus haut mais je le kiffe ce livre). J’apprends ou plutôt je réapprends les notions de relation d’aide que je peux mettre en pratique auprès de mon entourage immédiat.
Mes créations deviennent plus spontanées, le processus créatif plus fluide grâce à une meilleure connaissance de moi-même; mes résistances sont apaisées et je cohabite avec mon BB artiste en bonne intelligence émotionnelle.
Pas de commission en juin, pas de nouvelles, au téléphone on me dit que mon dossier est enregistré et qu’ils ne peuvent pas me dire quand aura lieu la commission qui décidera de mon sort; la dame me dit quand même que si je n’ai pas reçu de réponse sous deux mois, c’est considéré comme accepté. En parallèle je pose des questions sur la plateforme dans mon espace perso et j’obtiens la même réponse. Cela porte au 31 juillet ma deadline.
Heureusement je suis bien occupée, début juillet je démarre ma deuxième formation « Animer et accompagner avec le Journal Créatif » pour compléter le cursus Art-thérapie. Cette formation dure un an pour pouvoir être certifée et utiliser la marque déposée. En guise de lancement, nous avons cinq jours de Zoom à un rythme intensif avec la fondatrice de la marque et de son école « Le Jet d’Ancre » , Anne-Marie Jobin, et son équipe ; nous sommes 60 en tout, réparties en 3 sous-groupes de 20… L’organisation est top et je découvre cet outil du journal créatif autrement avec ses fondements théoriques et son application immédiate sur moi.
Je gère mon attente plutôt bien…
Le 18 juillet, je vois que mon dossier a changé de statut : il est passé de «Déposé» à « En cours d’instruction » ; ça y est à nouveau le stress qui monte , je guette tous les jours… le 22, nouveau changement : « Présenté en commission » avec une date prévue au 28 juillet et résultats le 29… rassurée mais encore plus stressée !
Le 28 matin statut : « Commission en cours » ; je rafraichis l’écran plusieurs fois au cas où ; nouveau changement dans l’après-midi, c’est repassé à : «Présenté en commission »; je reste perplexe… plusieurs interprétations possibles … ça mouline toute la nuit…
29 matin, je suis avec une amie en train de boire un café en terrasse ; elle m’a aidée pour le tableau de financement ; elle aussi est dans l’attente … rafraîchissements toutes les 10 min mais rien … vers midi, heure raisonnable pour clôturer le café, je me lève et là, je vois une notification mail de Transitions Pro m’enjoignant à aller voir dans mon espace… 😬
Je m’y rue pour découvrir le mot magique sur fond vert, un vert qui se diffuse dans tout mon corps …
Je jette mon téléphone de manière compulsive, je le reprends, je me reprends et je lis le courrier joint avec joie et soulagement … je ris et je pleure 😄🥲
Ca y est je vais pouvoir démissionner !!!!
Le 30, en allant au travail, nouvelle angoisse … et si c’était la pire décision à prendre … 26 ans que j’y suis quand même…
J’arrive au travail ; j’en parle à mes deux responsables, qui me félicitent pour mon projet … j’ai de la chance, l’angoisse est passée !!! .. même si je sais qu’elle reviendra…
Nous réglons rapidement la question de la lettre de démission et je fixe au 7 octobre mon dernier jour ; tout était déjà prévu pour ma suite donc pas de discussions là-dessus…
Quelques jours après , je reçois une lettre avec AR qui me signifie que ma démission est prise en compte et qu’à partir du 8 octobre je n’aurai plus aucun lien avec mon entreprise. A quoi sert cette phrase, franchement ?
C’est le mois d’août, je pars en congés avec des sensations multiples, du vide et en même temps une euphorie naissante, avec le sentiment de nouveaux territoires à conquérir, l’impression d’être une aventurière … je me sens nue d’être dépouillée de mon identité professionnelle, j’ai l’impression que mes failles sont énormes et bien visibles mais que quelque chose est en train de se retisser … il suffit juste de laisser faire, de rester à l’écoute …
Je me rends compte à l’écriture de ce récit que ça peut paraître ridicule ou bien petit par rapport à ce qui passe dans le monde … mais c’est ma réalité du moment … j’aspire à m’élever et à atteindre le haut de la spirale dynamique (je fais référence au livre de Ken Wilber que lit mon fils en ce moment), mais on ne peut brûler les étapes et celle-là est importante … vivre un nouveau départ est une remise en perspective de toutes ses valeurs, croyances et une consolidation de ses acquis également. Sans ma vie en entreprise je n’aurais jamais pu me lancer avec cet optimisme chevillé au corps. J’ai encore plein de choses à apprendre mais à balayer mes expériences passées je me dis que j’ai déjà réalisé des grosses choses que je ne pensais pas pouvoir faire … je suis déjà passée maintes fois par ce processus de changement … même si cette boucle est la plus importante de ma vie je pense, je reste confiante, je suis bien entourée, j’ai de la change d’être soutenue et de pouvoir bénéficier de ce dispositif tombé du ciel pour moi. J’évite un gros emprunt avec le stress qui va avec, un bore out naissant, un fil à la pâte avec le devoir de retour en entreprise qui m’aurait sûrement freinée malgré tout, …
Septembre, c’est la reprise de mes formations et également le début de mon préavis. Période bizarre, un peu troublante, je suis déjà un pied dehors, je reste proche de mes collègues pour ne pas m’isoler trop vite… je fais du ménage dans mes dossiers, mes mails… je me tranfère sur ma messagerie perso tout ce qui pourrait me servir un jour; je fais une descente dans mes archives papiers également; je relis des vieux documents, je me replonge dans plein de souvenirs 26 ans ça laisse des traces. Je n’arrive pas à me défaire de quelques reliques, des affiches de mon ancienne équipe, des projets, mon mémoire de mastère pro en architecture d’entreprise, une cartographie d’applications très graphique, presque une oeuvre d’art, des documents sur la gouvernance SI …. Un mail que j’avais écrit en 2002 au début de mon parcours dans les SI; après un audit de 6 mois j’avais exposé ma vision des choses au DSI de l’époque ; vision très en avance de phase mais assez juste avec le recul de presque 20 ans … cela a été une frustration de n’avoir pas réussi à convaincre de la nécessité d’un référentiel d’entreprise dans cette grosse structure où le SI n’a qu’une pauvre place de support mais également une leçon de sagesse, très utile en relation d’aide : « laisser passer les choses sur lesquelles on a pas de contrôle… revenir dans l’ici et maintenant… à partir de cette reconnaissance honnête de la situation, que vais-je pouvoir faire …? »
Mi septembre, J – 10, mon départ définitif approche. Je suis entrain de réfléchir à mon pot de départ que je souhaite créatif à l’image de ma nouvelle identité. J’ai déjà fait un premier repas d’au-revoir avec l’équipe rapprochée du dernier projet que j’ai accompagné ; nous étions 7, j’avais préparé des petits mots pour chacun, sans trop réfléchir mais avec la volonté de traduire mes sentiments réels pour chacun d’eux; je ne regrette pas de m’être exposée de la sorte car après ces lectures, nous avons passé un super repas avec beaucoup de rires et d’échanges vrais, chose rarissime au travail, rare tout court d’ailleurs. Je quitte des personnes de qualité, auxquelles je me suis attachée… pas simple émotionnellement à gérer, je sais que je vais garder quelques liens mais en même temps j’intègre des nouvelles relations intéressantes également au travers de la formation que j’ai démarrée depuis 7 mois … ça fait beaucoup d’interactions à gérer. Je dors mal mais je suis heureuse globalement.
J-2, jour de mon pot de départ de la DRH où je suis depuis 3 ans. 25 personnes, je ne connais pas tt le monde, beaucoup de nouveaux et des personnes avec qui je n’ai pas eu l’occasion de travailler, COVID impact…
Dans la lancée de mon repas d’au-revoir, j’ai écrit des petits mots pour chaque personne de manière assez spontanée. Je les ai placés dans une mini enveloppe avec une craie grasse blanche.
Pourquoi une craie grasse ? C’est la question qu’ils se sont posés. En réponse j’ai sorti mon paper board sur lequel on phosphore d’habitude … je les ai invités à écrire un mot ou faire un dessin en relation avec la DRH; j’avais au préalable écrit en gros au milieu DRH à la craie blanche. Ils ont pris leur craie et sans savoir trop pourquoi ils ont commencé à écrire et à dessiner. Une fois que tout la feuille a été recouverte, j’ai sorti mes boîtes d’aquarelles et mes pinceaux et à nouveau je les ai invités à mettre de la couleur sur la feuille.
Là j’ai obtenu mon petit effet, les écritures et les dessins sont ressortis plus blanc que jamais sur les couleurs et le tableau de la DRH a pris forme… c’était joyeux, magique et léger… ça m’a permis de mieux gérer mon émotion …
Je suis heureuse de leur avoir laissé ce souvenir de moi. Il y a eu aussi des éloges et des cadeaux, c’était super et j’ai pu prendre une photo de ce moment heureux.
J’en ai profité pour laisser également quelques cartes de visites en vu de mon réseau pour mon futur business Web 😉
J-1, je fais mon circuit de départ tranquillement; je mange avec JM qui est la personne qui me manquera le plus au quotidien.
C’est le jour J, je viens dire au revoir aux personnes que je n’ai pas encore vues et déjeuner pour la dernière fois avec JM et JA … c’est étonnement léger je ne sens pas grand chose… je suis là présente, tout à ce qu’ils disent de leur vécu qui ne sera plus le mien désormais, je me dis que je les reverrai c’est cool, c’est pas la fin, on rigole … 16H je passe à l’accueil rendre mon badge qui m’accompagne depuis 26 ans ; j’ai pris une photo pour garder une trace ainsi que de mon ex bureau.
Désormais je dirai mon ex comme pour parler d’une ancienne relation dont on a divorcé d’un commun accord. Nous sommes libérées l’une l’autre mais nous gardons un contact bienveillant. J’ai rendu tous les objets qui me reliaient à elle : ordinateur, clé USB, Token, badge … mais j’ai gardé l’essentiel que sont les liens que j’ai tissés avec des personnes que j’apprécie, dont certaines sont devenues des ami.e.s.
Comme je l’ai écrit dans mon mail d’au revoir, je salue la vie qui m’a placée sur le chemin de cette grande entreprise à la force de laquelle je me suis progressivement émancipée. Avec le recul j’éprouve de la gratitude là où je ne pensais voir qu’une erreur d’orientation. Si je peux sauter ce pas de démissionner, c’est grâce aussi à tout le bagage professionnel que j’emporte avec moi, cette assurance d’avoir accompli des choses avec engagement et succès.
Ce mail d’au-revoir m’a permis d’achever mon processus de deuil.
Je suis partagée entre tristesse et légèreté.
J+1, émotion persistante – je m’inscris à Pôle emploi sans difficulté. Les documents de mon entreprise comme le solde de tout compte et mon attestation Pôle emploi n’arriveront qu’à la fin du mois donc pour l’instant je sollicite un rendez-vous une fois mon compte créé sur la plateforme, une nouvelle plateforme administrative, je suis ravie 😀…
J+ 24, j’ai reçu un courrier attendu mais néanmoins désagréable de ma mutuelle de groupe m’informant de ma radiation. Je peux demander une portabilité pour un an avec maintien de mes droits à partir du moment où je suis inscrite à Pôle emploi. C’est ce que je ferai dès que j’aurai mon attestation.
J’ai reçu un recommandé que je dois aller chercher à la poste avant mon rendez-vous Pôle emploi dans deux jours. C’est mon solde de tout compte, ma déclaration Pôle emploi et mon certificat de travail. C’est ce dernier document avec la notification de Transition pro qui permettent à pôle emploi d’examiner ma situation pour savoir précisément combien je vais toucher pour le mois de novembre; pour l’instant j’ai tablé sur des simulations et tant que c’est pas là, le doute se réinstalle…
J+ 26, jour de mon rendez-vous enfin !!
Tout s’est très bien passé je suis bien suivie par Pôle emploi pendant 2 ans et demie ; quelqu’un va instruire le montant de mes allocations sous 10 jours, nouvelle attente…
J + 1 mois et 10 jours : je reçois un appel de Pôle emploi me disant qu’il y a un souci dans mon dossier (l’algorithme…) et qu’ils vont devoir refuser les allocations … grand blanc … je sens mon regard se brouiller … je reste figée à ma table pendant deux heures sans pouvoir faire quoique ce soit.
A priori, mon entreprise étant en convention de gestion avec Pôle emploi, c’est elle qui devrait rembourser l’ARE versée par Pôle emploi. Hors une rupture de contrat pour démission reconversion n’est pas mentionnée comme étant sujette à ARE, et encore moins dans le cadre de ce dispositif récent.
J+ 2 mois : je digère mal, je cherche des pistes, je cherche à comprendre, je pose un recours auprès du médiateur régional de Pôle emploi, je consulte un avocat pour connaître mes droits, je fais part de ma mésaventure à mon entreprise qui me soutient heureusement ; eux n’ont rien vu venir non plus, ils auraient dû m’informer mais c’est si rare ce genre de démission que personne n’a réagi. Côté CEP, pas mieux, ils n’ont jamais pensé à me demander de vérifier si mon entreprise était en auto-assurance, auquel cas (c’était écrit dans une FAQ de transition PRO depuis mars 2021), le dispositif ne s’applique pas…, côté Pôle emploi, pas mieux; les personnes que j’avais appelées pour vérifier et qui savaient très bien de quelle entreprise il s’agissait, n’ont jamais pensé à me dire qu’elle était sur une liste à part…, et personne n’est responsable car personne n’a pour mission de tamponner l’éligibilité au dispositif; ça se fait en fin de processus par validation ou refus des ARE par Pôle emploi.
Je ne suis sûre de rien, je suis en colère, choquée, angoissée … après tous ces mois d’instruction, d’attente, de préparation… Je suis victime mais je peux n’en vouloir à personne réellement, je me rends bien compte que je tombe dans l’application non mature d’une loi récente et que les personnes autour de moi subissent aussi les procédures administratives.
J+2 mois et 10 jours : le temps passe, je commence à prendre dans mes économies dédiées à financer mes formations et mon futur lieu de pratique… je stresse mais je reste concentrée sur mon projet, mes formations qui me portent toujours autant, je me dis que j’ai bien fait quand même malgré tout, c’était ma voie.
Gros point positif, j’ai un interlocuteur à la DRHRS de mon entreprise qui s’occupe de mon dossier; ils demandent à Pôle emploi de déroger en proposant de financer mes allocations. Malgré un refus de Pôle emploi disant que ça n’est pas de leur ressort de déroger – ce soutien me fait du bien, je reprends espoir. Côté Pôle emploi, la médiatrice ne m’est d’aucune aide, elle ne fait que répéter des phrases toutes faites mais ne propose aucune solution; c’est à l’entreprise de se débrouiller. Ce qu’elle fait en escaladant la demande de dérogation exceptionnelle auprès de la DGEFP – Direction Générale de l’Emploi et de la Formation Professionnelle.
Je patiente, pas le choix, je relance côté entreprise pour avoir des news et côté Pôle emploi pour leur signaler que je suis toujours là en attente … ma conseillère avec qui j’ai un entretien de suivi classique en tant qu’inscrite à Pôle emploi sans allocations – c’est pratique quand même pour avoir la gratuité dans les musées – et à qui je raconte mon histoire à nouveau, ne connait même pas la DGEFP qui est sa direction de rattachement … bref pas grave, elle fait quand même un geste pour aller se renseigner et savoir où en est le dossier.
Dernière semaine de travail avant Noël : j’ai une info, mon dossier est en cours d’étude à la DGEFP; pas coincé sous une pile, bien dans les mains de quelqu’un qui va statuer de mon sort… j’espère un cadeau pour Noël mais non … la nouvelle année s’annonce et j’avoue que je commence à trouver le temps long … j’ai mis mes travaux à l’arrêt… non prioritaire pour l’instant.
J + 3 mois et 4 jours : nous sommes le 11 janvier 2022, je n’oublierai pas cette date de sitôt … encore dans mon lit à moitié réveillée, je check mes mails Pôle emploi par habitude, en espérant une bonne nouvelle … et là Oh bonheur! je vois écrit « Notification admission ARE19″… je me précipite dans mon espace Pôle emploi où effectivement un nouveau courrier me notifie que je peux poursuivre mon inscription et transmettre les documents manquants pour le paiement de mes indemnités… je n’y crois pas … j’attends … au cas où … jusqu’à ce que je reçoive un mail de mon correspondant entreprise me disant que Pôle emploi a débloqué la situation sur décision de la DGEFP. Trop d’émotions d’un coup, je pleure de joie .. j’ai envie de remercier la terre entière… je vais enfin pouvoir me projeter sereinement et poursuive ma route.
Voilà, ce chapitre est derrière moi maintenant. Après quelques jours, je me dis que j’ai eu de la chance ; je serai sans doute la seule personne de mon entreprise à bénéficier de ce dispositif … c’est dommage.
Je pense que cet excellent dispositif devrait être applicable à tous ceux qui ont un projet et qui manifestent des symptômes de pré burn ou bore out… tout le monde a à y gagner en fait …
5 réponses à “Mon parcours démission – reconversion”
Bravo Anne, quel acharnement, ne lâchez rien 😉
Merci … oui il faut y croire et croire en soi aussi 🤩
Anne
Bravo !!! Super !!! le chemin est parfois long mais nécessaire quand on est persuadé de ce qui est bon pour soi, il est important d’aller jusqu’au bout.
J’aime beaucoup votre devise » faire honneur à soi ».
Comme vous ce livre » Femmes qui courent avec les loups » est un outil qui à révéler la femme sauvage que j’avais enfoui en moi.
Merci pour votre témoignage honnête et sincère.
Merci pour votre retour 🤩
Anne
Merci pour ce partage !!!